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Crématorium : qui refuse le débat ?

Qui refuse le débat ?

où c’est celui qui dit qui y est

 

Dans son communiqué à la Dépêche du 2 mars 2017, le maire de Seysses indique qu’ « un groupe de personnes est désormais présent lors des séances du conseil municipal, pas pour débattre démocratiquement et sérieusement, mais pour imposer son point de vue d’opposition au projet de crématorium porté par le Sivom SAGe. » (cliquer sur l’image pour lire l’article, puis revenez au texte par la touche ‘échap’)

Mais les images du conseil municipal du 1er février, à la suite duquel ce communiqué est publié dans La Dépêche, font apparaître que ce qui est dit par le maire est inexact.

 

Ce qui est exact

Il est exact que les derniers conseils municipaux, ont vu en effet une présence accrue des citoyens aux débats des élus, ce dont on ne peut que se féliciter : il est urgent que les citoyens se réapproprient les lieux où s’exerce la démocratie (où devrait s’exercer la démocratie…), en particulier la démocratie locale, à la base de tout. Loin de se réjouir d’une telle présence, le maire, Alain Pace, a demandé à la gendarmerie d’être présente. Faut-il comprendre que voir les gens assister au conseil municipal représente pour les élus seyssois une menace ? Qu’ont-ils donc à se reprocher ?

Il est exact que ces personnes sont opposées à l’implantation du crématorium sur un terrain agricole, et sont venues dans l’espoir de pouvoir poser les questions qui les inquiètent depuis un an et demi, et pour lesquelles elles n’ont toujours pas eu de réponse franche et claire. Ni de la part du maire de Seysses, qui esquive toujours le débat, ni de la part d’Alain Bertrand, Président du SIVOM, qui a refusé de les rencontrer. A leurs interrogations s’ajoutent donc aujourd’hui une exaspération et une défiance bien légitimes. A trop mentir aux gens, on finit par perdre leur confiance.

Lors de ces conseils municipaux, dont celui qui a précédé le communiqué du maire, deux porte-paroles de deux associations locales ont, entre autres, pris la parole. Il s’agit de la présidente de l’association Seysses environnement et de la maraichère bio dont les terres sont toutes proches de l’implantation prévue pour le moment (AMAP de la ferme du Petit Scarabée, chemin du Massoné).

Ecoutons-les :

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Le ton employé est bien celui du débat citoyen, très poli, d’ailleurs, très respectueux. Inquiet, très inquiet même pour cette agricultrice qui risque de perdre des années d’un travail pénible. Les questions posées sont claires, et appellent des réponses.

Justement, que répond le maire ? Ecoutons :

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Le maire, clairement, ne souhaite pas débattre. Il avait fait de même au conseil municipal précédent, il a fait de même au conseil municipal du 12 avril dernier, en réaffirmant : il n’y a pas de débat. Ainsi, il accuse ces personnes légitimement inquiètes de ne pas vouloir débattre démocratiquement, mais c’est lui qui ne veut pas débattre.

Contrairement à ce qu’il dit, le débat pourtant existe : le projet du SIVOM de la Saudrune, aujourd’hui Sivom SAGe, existe bien ; tout est mis en oeuvre pour l’implantation d’un crématorium sur un terrain agricole, chemin du Massoné, à Seysses (voir sur ce sujet l’article http://lien-seyssois.fr/wp-admin/post.php?post=1185&action=edit ). L’avancée du projet, même s’il n’a pas reçu toutes les autorisations, met en débat la question de savoir s’il est opportun d’implanter ce crématorium sur un terrain agricole, sans avoir fait aucune étude sur la validité de cet emplacement, et sans avoir fait d’étude d’impact sérieuse.

 

Il n’y a pas besoin d’une autorisation pour se poser des questions !

Ce débat, c’est bien lui, le maire de Seysses, qui l’initie, par sa participation à la décision prise. Comment peut-il s’étonner que les gens veuillent débattre ? N’essaie-t-il pas plutôt d’esquiver un débat pour lequel il n’a pas d’arguments ? Car il n’y a pas besoin d’avoir reçu une autorisation, pour se demander et débattre de l’opportunité d’implanter un crématorium sur un terrain agricole. Il aurait même mieux valu en débattre avant d’en être à demander l’autorisation de déclasser le terrain. Sauf à penser que, l’autorisation obtenue, il ne resterait plus qu’à mettre tout le monde devant le fait accompli, sans plus de débat. Quand on voit tout ce qui a déjà été fait, sans garantie d’autorisation, on ne peut que s’inquiéter de ce qui pourrait l’être si une autorisation est donnée.

A titre de comparaison (d’exemple ?), regardons comment ça se passe du côté du Sicoval, qui a le même projet : «Il est important d’avoir une réflexion sociale sur ce type de service», affirme Jacques Oberti, le président du SIVOM local, équivalent donc d’Alain Bertrand pour nous. Tous les élus sont consultés (Tiens, en d’autres terres, la démocratie existe donc ?) : 91% d’entre eux disent «oui» au projet. Puis un appel est lancé auprès des communes membres pour connaître les communes  candidates à un tel équipement. Il semble que la transparence soit plus transparente à l’Est… A l’inverse, au Sivom de la Saudrune, tout se fait dans l’opacité, de l’aveu même du maire de Seysses, qui répond régulièrement : « Je ne sais pas, allez demander au Sivom« . C’est curieux, son nom figure pourtant sur les délibérations du Sivom, dont il était il y a peu encore vice-président.

 

Ecoutons-le nier être au courant : cm20170201extrait4

 

Et maintenant, regardons la délibération du conseil syndical du SIVOM qui décide de l’achat de ces terrains, délibération où il figure, il est alors vice-président du SIVOM (cliquez sur l’image pour agrandir, puis revenez au texte en tapant sur la touche ‘échap’).

 

Si ça ce n’est pas un flagrant délit de mensonge... et de mépris pour les gens. Deux autres élus seyssois étaient présents lors de cette délibération du SIVOM, Alain Aubert et Geneviève Fabre. Ils sont donc au courant eux aussi. Mais sur ce sujet ils se taisent soigneusement. A ce jour, la division parcellaire est faite.

Et puis, comment Alain Pace peut-il renvoyer les gens vers le SIVOM, alors qu’Alain Bertrand, son président, refuse de les recevoir, et se cache depuis le début de cette affaire? Il est vrai qu’il est très occupé à faire avancer en douce le projet, pendant qu’Alain Pace fait diversion à Seysses. On ne peut être au crématorium et au moulin.

 

On peut donc conclure : c’est un faux pour le maire de Seysses

Dire des personnes qui viennent assister au conseil municipal qu’elles ne viennent « pas pour débattre démocratiquement et sérieusement, mais pour imposer [leur] point de vue d’opposition au projet de crématorium porté par le Sivom SAGe » est une manipulation. Le déclarer dans un média aussi populaire que le quotidien local, alors que les lecteurs n’ont pas les moyens de vérifier ces dires est une manœuvre mensongère, dont il est difficile de ne pas penser qu’elle vise à discréditer ces personnes auprès de l’opinion publique. Très utile au moment d’annoncer qu’un vote va avoir lieu. Mentir aussi grossièrement pour échapper au débat est simplement honteux.

A travers les documents communiqués ici, il apparaît par contre clairement que c’est le maire de Seysses et le Président du SIVOM de la Saudrune qui refusent le débat, et qui veulent imposer l’implantation d’un crématorium sur un terrain agricole seyssois.

 

Terminons par ce communiqué du ‘groupe de personnes présentes au conseil municipal’, très dignes dans leur protestation, communiqué publié dans La Dépêche du 8 mars 2017, sous la rubrique ‘Environnement’ :

«Non M. le Maire, nous tous qui venons assister aux conseils municipaux nous ne sommes pas des menteurs ni des détracteurs.

Nous sommes des femmes, des hommes, des mères, des pères, des retraités, des grands-parents, des promeneurs.

Nous aimons notre ville, et les gens qui y habitent !

Si nous nous déplaçons lors des conseils municipaux, c’est justement parce que nous recherchons le débat démocratique. Or il vous est récemment arrivé de vous y opposer, à ce débat, en ne donnant même pas la parole aux élus de l’opposition auxquels, pourtant, vous n’aviez pas le droit de la refuser !

Qui est le détracteur lorsque vous dites que nous sommes contre le crématorium, alors que nous nous opposons seulement à l’endroit choisi pour son installation ? Et d’ailleurs nous ne sommes pas les seuls, vu le nombre d’avis défavorables que ce projet a reçu de la part de nombreuses autorités administratives.

Vous prétendez que nous sommes «un groupe qui veut imposer son point de vue», or, M. le Maire, nous ne prenons jamais la parole si vous ne nous la donnez pas. Notre attitude lors du déroulement du Conseil Municipal a toujours été parfaitement respectueuse. Et lorsque nous pouvons vous poser des questions, vous avez tout loisir de nous répondre, et de nous contredire. Ce serait donc notre présence qui vous importunerait ?

Nous regrettons beaucoup que les «seyssoises et les seyssois favorables au projet», dont vous parlez, ne viennent pas également assister aux conseils municipaux, cela nous permettrait de pouvoir comprendre leurs arguments pour nous expliquer le bien-fondé du crématorium à cet endroit. Pourquoi n’avez-vous pas eu l’idée d’organiser une réunion publique, spécialement consacrée à ce sujet, qui aurait permis ces échanges ?

Mais maintenant, grâce à la demande insistante d’un élu de l’opposition, vous avez pris l’excellente décision d’organiser un référendum. Nous vous en félicitons très chaleureusement ! Nous regrettons seulement que vous ne vous soyez pas décidé à agir démocratiquement plus tôt.»

 

Alors, à quand un débat ? A quand une réunion publique ?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Concurrence entre crématoriums

La concurrence entre les crématoriums de la Haute-Garonne pourrait devenir rude

Le marché des crémations étant juteux, le nombre des entreprises proposant leurs services va croissant. Elles sont aujourd’hui plusieurs à se faire une concurrence acharnée et à se livrer à de multiples actions lobbyistes pour obtenir les faveurs de nos élus, et le marché d’une délégation.

Auprès de notre SIVOM, c’est la Société des Crématorium de France, société par actions au capital de 4 millions et demi d’euros, qui a obtenu le marché de délégation. Cette société gère déjà une vingtaine de crématoriums en France, sauf dans le Sud-Ouest, où elle peine à s’implanter. Seysses serait donc le premier lieu où elle pourrait prendre pied.

Un projet semblable est en cours au Sicoval (Deyme ou Baziège), dans le Sud Est toulousain, projet moins avancé que celui du SIVOM de la Saudrune (aujourd’hui SIVOM SAGe). Vers un second crématorium dans le Sud Toulousain

Voilà que le Grand Toulouse entre dans le jeu, en se démarquant de ses concurrents, puisqu’il s’agit cette fois d’un projet en régie. Pour lire l’article de La Dépêche qui donne cette information, cliquer sur l’image.

 

Régie ou Délégation ?

Dans le cadre de la régie, un constructeur est choisi, mais ensuite le service de crémation est proposé par l’intercommunalité (ou la municipalité) même qui accueille l’établissement. C’est donc elle qui gère le site, ses services et le personnel. Elle aussi qui reçoit les bénéfices – ou les pertes –  dégagés par l’activité.

Dans le cadre de la délégation, une entreprise est choisie à la fois pour construire et pour exploiter le crématorium. La délégation est accordée pour un nombre d’années fixé en début de contrat. Une redevance est versée à la commune qui accueille le site.

Le SIVOM de la Saudrune a fait le choix d’une délégation. Toulouse, qui estime que la gestion d’un crématorium est rentable, a choisi la régie.

 

A-t-on besoin de trois crématoriums en Haute-Garonne ?

Un crématorium de plus dans le département est une évidence. En faut-il plus ? Le Grand Toulouse n’est pas centré sur le département de la Haute-Garonne. Il est proche de quatre autres départements (Ariège, Gers, Tarn, Tarn et Garonne), qui peuvent, eux aussi, se lancer dans la construction de crématoriums. Les habitants de Haute-Garonne auraient ainsi le choix, selon l’endroit où ils habitent, d’aller dans le crématorium du département voisin, plus proche de chez eux, au détriment des crématoriums haut-garonnais. Moins de rentabilité en perspective.

En France, des crématoriums ont dû fermer, victimes de la concurrence.

 » au moins 700 à 800 crémations par an sont nécessaires pour amortir la mise en place d’un four. Un seuil qu’un tiers des installations n’atteint pas. Surtout dans les zones où la concurrence fait rage. A Roanne et Mably, deux crématoriums situés à quelques centaines de mètres sont en rivalité directe. « Avec 420 crémations chacun en 2014, aucun n’est en mesure d’être rentable », commente un professionnel.

Situation voisine autour de Meaux, où deux sites sont sortis de terre en deux ans. En Haute-Savoie, celui de la Balme, concurrencé par deux autres, a même déposé son bilan. Après dix-huit mois de restructuration, ses dirigeants espèrent bien que leur plan de continuation sera validé par le tribunal le 17 novembre.

Des pertes à n’en plus finir, c’est bien ce que veut éviter Patrick Gomel, le directeur du crématorium de Boulogne (Pas-de-Calais). Ouvert par les collectivités locales en 2013, cet équipement s’acheminait doucement vers l’équilibre financier au bout de cinq ou six ans. Une perspective chamboulée par la création d’une unité concurrente à Réty, à quinze minutes en voiture, par le principal entrepreneur local de pompes funèbres. « Il n’y a pas la population suffisante pour deux crématoriums, peste M. Gomel. Si ce projet voit le jour, il ne pourra pas trouver les recettes nécessaires et notre propre activité s’effondrera. C’est un non-sens qui risque de coûter cher à tout me monde ! » Tous ses espoirs reposent désormais sur la préfète du Pas-de-Calais, appelée à donner ou non son feu vert à la création du site.

Au-delà, nombre de professionnels aimeraient que les régions se dotent de schémas directeurs pour que les implantations soient mieux réparties. C’est ce que suggère depuis longtemps le sénateur (PS) Jean-Pierre Sueur. Sa proposition en ce sens a été adoptée à l’unanimité par le Sénat en mai 2014. L’Assemblée nationale ne paraît pas pressée de lui donner force de loi. » (article du Monde Economique du 31 octobre 2015)

Le problème sur le plan environnemental est que lorsqu’un crématorium ferme, les structures, bâtiments, conduites souterraines, routes et aires de parking, restent, se dégradent et finissent en friches industrielles. A ouvrir deux ou trois crématoriums, il faut donc être sûr qu’ils vont être pérennes.

Sur ce sujet, une loi est en cours de rédaction à l’assemblée nationale, et devrait sortir en 2018. Elle viserait à réguler l’emplacement des crématoriums sur le territoire français pour éviter la concurrence sauvage que des groupes importants se livrent dans une guerre commerciale et financière. La mort attise bien des convoitises.

Rappelons enfin que la demande de crémation en hausse aujourd’hui pourrait n’être qu’un effet de génération, comme le montre l’enquête de Denis Cosnard dans Le Monde (http://lien-seyssois.fr/wp-admin/post.php?post=1000&action=edit ). La nouvelle génération ne plébiscite pas ce mode de funérailles. Le début de cet article le dit clairement :

« Il faudrait peut-être se calmer », reconnaît Jo Le Lamer, le président de la Fédération française de crémation. « On a ce qu’il faut pour les besoins actuels », appuie Jean Ruellan, un des dirigeants d’OGF, le leader français du secteur sous les marques PFG, Roblot, Borniol… Deux études tendent en effet à montrer que l’impressionnant essor de la crémation en France atteint ses limites.

« La première émane de la Fédération française de crémation elle-même. Chaque année, ce regroupement d’associations recense les décès à l’issue desquels le corps a été incinéré. En une génération, cette pratique est devenue un phénomène de masse. Elle concerne désormais plus d’un tiers des obsèques, contre 1 % en 1980. A Paris, le taux de crémation atteint même 47 %. Mais cette ascension se révèle de moins en moins rapide. En 2014, la part des crémations dans l’Hexagone est modestement passée de 34,1 % à 34,5 %, la plus faible hausse depuis des décennies. « Le mouvement se tasse », constate M. Le Lamer, qui s’attendait à un chiffre supérieur.

« Le deuxième signal provient du dernier sondage d’Ipsos sur les Français et la mort. « Pour vos propres obsèques, que préféreriez-vous ?», demande régulièrement l’institut aux Français. Depuis quelques années, la part de ceux penchant pour une crémation stagne autour de 51 %. Et la dernière vague, réalisée en juillet auprès de 1 010 personnes, marque une nette remontée de la préférence pour l’inhumation dans deux types de populations. Parmi les moins de 35 ans, 60 % sont désormais tenants de l’enterrement, contre 50 % en 2007. Leur part est passée dans le même temps de 72 % à 80 % au sein des croyants et pratiquants. […]

 

Quel sera le projet le mieux adapté ?

Pour en revenir à Seysses, encore une fois, soulignons-le : l’absence d’étude sur le choix du terrain, pointée par le préfet lui-même, l’imposition autoritaire d’un terrain agricole et à ce titre protégé pour l’implantation, l’opacité des manœuvres politiques aux niveaux d’Axe Sud et du Sivom de la Saudrune, les manipulations au niveau du SCOT pour contourner ce qui fait loi, pourraient desservir un projet pour lequel des élus de la précédente mandature ont fait un gros travail d’analyse et de préparation. A choisir entre un site ou un autre, le Grand Toulouse, le Sicoval ou Seysses, le projet du SIVOM de la Saudrune pourrait ne pas paraître le plus adapté.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

crématorium et polllution

Bon alors, ça pollue ou ça pollue pas ?

 

Le mois dernier, le maire de Seysses recevait à leur demande l’agricultrice de la ferme du Petit Scarabée et trois représentants AMAP, inquiets de voir le crématorium s’implanter à quelques mètres de l’exploitation bio seyssoise. On les comprend. Entre autres invités surprise de cette rencontre, un représentant de la société chargée de construire et d’exploiter le crématorium était là, pour affirmer qu’il n’y aurait pas de pollution.

Par ailleurs, face aux inquiétudes des seyssois, l’association crématiste de la Haute-Garonne, ce 30 mars, rendait public via La Dépêche un communiqué criant au mensonge et affirmant : « Non, les crématoriums n’ont aucune incidence sur l’environnement, les chiffres officiels le prouvent et nous pouvons les présenter. »

La question  n’est pas des moindres. Elle concerne tous les seyssois, mais également les habitants de Lamasquère, tout proche. Un crématorium, est-ce que ça pollue, ou pas ? Et, plus largement, est-ce que ça a un impact sur l’environnement ?


Quelques remarques préalables sur la forme et les procédés :

Pour alimenter ce débat, il paraît important de s’assurer de la validité de ce qui se dit. Certaines interventions sont ainsi pour le moins maladroites.

-          Inviter à participer au débat la société privée qui va construire et exploiter le crématorium, n’est en rien un gage de validité : propriétaire et exploitant de plusieurs dizaines de crématoriums en France, cette société ne va pas dire qu’un crématorium pollue, elle va plutôt chercher à rassurer, pour qu’on la laisse faire tranquillement son business. Etant juge et partie dans cette affaire, ce qu’elle apporte au débat ne peut être crédible.

-          Dans son communiqué à La Dépêche, l’association crématiste de la Haute-Garonne, nie des évidences : elle a le droit de penser que les normes d’émission de gaz toxiques proposées par la loi sont valables. Mais de là à prétendre que « les crématoriums n’ont aucune incidence sur l’environnement», c’est faire un raccourci qui va à l’encontre de la prise de conscience environnementale à l’échelle mondiale. L’environnement, ce n’est en effet pas que la pollution de l’air. L’impact sur l’environnement relève du bon sens, et les chiffres officiels n’ont rien à voir là-dedans : milieu et équilibre écologiques modifiés, puisqu’il s’agit d’une implantation en milieu agricole et naturel ; surface de terres imperméabilisées augmentée ; impact des accès routiers créés et des canalisations de gaz implantées souterrainement ;  passage des convois sur des lieux peu fréquentés, ce qui les rend encore plus visibles que quand ils sont dispersés dans la circulation ; et, outre cette augmentation significative du trafic local, l’impact psychologique sur les riverains exposés au spectacle quotidien et attristant du deuil. Oui, toute infrastructure industrielle a un impact sur l’environnement, et le nier relève d’un procédé peu louable.

-          Attention à ne pas dévoyer le débat : les protestations les plus visibles aujourd’hui ne s’opposent pas à l’implantation d’un crématorium à Seysses, contrairement à ce que l’on voudrait faire croire. Elles s’opposent à son implantation sur un terrain agricole, au milieu d’une grande zone agricole et naturelle, loin des grandes voies de circulation, alors qu’il y a des alternatives, à Seysses ou dans les environs. Le maire de Seysses parle d’ailleurs justement dans son communiqué à la Dépêche d’une «opposition au projet de crématorium porté par le Sivom SAGe» (dont l’ex Sivom de la Saudrune fait partie). Rappelons, en effet, que ce nouvel emplacement pour le crématorium a été imposé par Alain Bertrand, maire de Frouzins, alors Président du Sivom de la Saudrune. Le projet initial de la mairie de Seysses était une implantation proche, elle,  de l’accès autoroutier, implantation initiale qui réunissait un large consensus.

-          Enfin, il faut noter que le débat arrive un peu tard : pour reprendre l’argumentaire proposé par Bruno R., lors du même débat en cours actuellement à Saint-Hostien (Haute-Loire), «Opacité totale. Aucune information auprès des habitants. C’est inadmissible. (…) Je suis un défenseur du principe de précaution. Le doute et la réflexion s’imposent avant un engagement sur un tel projet. (…) Il est nécessaire de partager les connaissances et les avis de tous avant de s’engager dans un tel projet. Une équipe communale doit avoir une vision cohérente et éclairée (voire éclairante !!) de l’avenir et cela ne peut se faire sans l’intégration de ceux qui l’ont désignée. » (https://www.change.org/p/non-au-cr%C3%A9matorium-%C3%A0-st-hostien) Oui, nos élus abusent trop souvent, parfois à leur profit, de la délégation de pouvoir que nous leur avons donnée et nous trahissent. La campagne électorale en cours ne le montre que trop, les élus se sont constitués en caste qui se veut supérieure. Les appels à la restauration d’un minimum de démocratie se multiplient, et à tous les niveaux le mécontentement augmente.

 

Un crématorium, est-ce que ça pollue, ou pas ?

La question n’est pas nouvelle. Elle a fait l’objet de nombreux débats dans les années 90 et 2000, et a conduit à de nouveaux textes réglementaires en 2010 (Ministère de la Santé et des Sports, Arrêté du 28 janvier 2010 paru au journal officiel du 16 février, relatif à la hauteur de la cheminée des crématoriums et aux quantités maximales de polluants contenus dans les gaz rejetés à l’atmosphère).

Jusque-là, contrairement à d’autres pays, la pollution engendrée par les crématoriums en France n’était pas prise en compte. Elle était pourtant loin d’être négligeable. L’association Française d’Information Funéraire en fait état en 2012. (http://www.afif.asso.fr/francais/conseils/conseil33.html ) :

L’Association française d’information funéraire est un association loi 1901 fondée par Michel Kawnik, qui se donne pour but l’information du public et la défense des intérêts des familles, en France et ailleurs, pour ce qui concerne la mort, les rites funéraires, le deuil et le souvenir. Cette association contribue aussi à des conférences, colloques, et participe à des commissions consultatives des services publics locaux. Cet organisme créé en 1992 est indépendant de tout syndicat, fédération, société commerciale ou autre association.

Cette association explique :

« L’or des prothèses dentaires, le métal des orthèses ou des prothèses articulaires sont soit collectés (les sociétés d’exploitation des crématoriums ne communiquent pas sur ce sujet et son commerce), soit évacués sous forme de poussière ou gazeuse ce qui est le cas lors de la sublimation du mercure contenu dans les amalgames dentaires.

« Les études sur la crémation se multiplient, notamment au Royaume-Uni. Les Anglais ont calculé que la crémation dégageait 1,35 tonne de mercure par an, dont la quasi-totalité, émise par rejet dans l’atmosphère. Le décret 94-117 du 20/12/1994 complété de l’arrêté du 29/12/1994 n’imposent aucun seuil pour le rejet du mercure et de la dioxine par les crématoriums.

« Par suite de la non-obligation législative de présence de filtres adaptés, les crématoriums français « sans filtre » sont responsables du tiers du total des émissions gazeuses de mercure qui est une substance cancérogène, mutagène et reprotoxique. » Le mercure se concentre également par bio-accumulation. Ce sont les animaux et les humains qui en souffrent le plus.

« Autres métaux lourds concernés : le plomb et le cadmium (Rapport d’information n° 261, les effets des métaux lourds sur l’environnement et la santé. Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques déposé le 5 avril 2001)

« La France, contrairement à bien d’autres pays européens, n’impose pas de système de filtration. Les pays du Nord, l’Allemagne, la Belgique et la Grande-Bretagne ont commencé depuis plusieurs années à s’équiper. Afin de lutter contre la grave pollution mercurielle, la Norvège a interdit en janvier 2008 l’emploi des amalgames dentaires au mercure.

« Lors d’une crémation, les produits formolés employés pour une conservation chimique du corps (thanatopraxie, soins de conservation, etc.) produisent de la dioxine.
La France, contrairement à bien d’autres pays européens, n’interdit pas ces injections lors d’une cérémonie d’obsèques avec crémation. La dioxine peut être à l’origine d’atteintes cutanées, d’altérations de la fonction hépatique, des systèmes immunitaires, nerveux et endocriniens et de la fonction de reproduction.

« En avril 2012, seuls 7 crématoriums français sur 144 sont équipés afin qu’aucune particule, mercure, dioxine et autres substances nocives majeures ne soient rejetés. En 2014,elles n’étaient encore que 9.

« Un arrêté signé le 28 janvier 2010, paru au JO le 16 février, oblige les crématoriums à s’équiper de filtre avant le 17 février 2018… Texte législatif intégral du 28/01/2010 (Cliquer) »

Et cette association concluait en 2012 : « Jusque 2018, les français devront supporter les dramatiques conséquences de santé dues au manque de respect du business de la mort! »

 

Qu’en est-il en 2017 ?

Un  crématorium qui dispose d’un filtre pollue moins qu’avant, mais ça ne signifie pas qu’il ne pollue plus, comme on voudrait nous le faire croire. Un crématorium équipé d’un filtre (obligatoire seulement à partir de février 2018) rejette :

-          20 mg/normal m3 de composés organiques (exprimés en carbone total) ;

-          700 mg/normal m3 d’oxydes d’azote (exprimés en équivalent dioxyde d’azote) ;

-          100 mg/normal m3 de monoxyde de carbone ;

-          100 mg/normal m3 de poussières ;

-          100 mg/normal m3 d’acide chlorhydrique ;

-          200 mg/normal m3 de dioxyde de soufre.

Donc oui, ça pollue. Certains diront « Ce n’est pas beaucoup », surtout s’ils habitent loin. D’autres diront « C’est déjà trop, soyons prudents ». Dans 10 ans, peut-être, on mesurera l’impact de ces quantités sur la santé des gens, et on les reverra à la baisse. En attendant, puisqu’on a le choix, autant réfléchir à l’endroit où on produit cette pollution, même si elle est réglementaire. Ce n’est même pas un principe de précaution, c’est du bon sens. Rien n’oblige à mettre ce crématorium au milieu d’une zone agricole et naturelle, loin des accès routiers.

Relativement à ces normes, une information interpelle : le crématorium du Père Lachaise, à Paris, a été équipé de deux filtres (coût : 450 000 euros). Dans le cadre de sa politique de développement durable, la Ville de Paris a en effet décidé d’aller très au-delà de la future obligation, en installant des dispositifs de filtration innovants et extrêmement performants.

Le tableau ci-dessous reprend les données constatées au Père Lachaise en 2015 :

POLLUANTS SYMBOLES EXIGENCES ACTUELLES* EXIGENCES FUTURES** DERNIERES ANALYSES DU PERE LACHAISE***
POUSSIERES < 100 mg / Nm3 < 10 mg / Nm3 3.01 mg / Nm3
MONOXYDE DECARBONE CO < 100 mg / Nm3 < 50 mg / Nm3 23.5 mg / Nm3
OXYDES D’AZOTE NOx < 700 mg / Nm3 < 500 mg / Nm3 366 mg / Nm3
COMPOSES ORGANIQUES VOLATILES COV < 20 mg / Nm3 < 20 mg / Nm3 3.32 mg / Nm3
ACIDE CHLORHYDRIQUE HCL < 100 mg / Nm3 < 30 mg / Nm3 4 mg / Nm3
DIOXYDE DE SOUFFRE SO² < 200 mg / Nm3 < 120 mg / Nm3 16,8 mg / Nm3
MERCURE HG < 0,2 mg / Nm3 0,016 mg / Nm3
DIOXINES ET FURANES PCDD et PCDF < 0,1 ng / Nm3 0,00714 ng / Nm3

-
*arrêté du 25 avril 1995
**arrêté du 28 janvier 2010 applicable le 29 janvier 2018
*** maximum des moyennes des analyses des deux lignes de filtration des fumées, ouest et est.

C’est dire si, pour certaines municipalités, et pas des moindres,  la prudence est de mise… Pourquoi ce qui est valable à Paris ne le serait pas en province ?

 

Crémation contre inhumation

L’association crématiste de la Haute-Garonne argumente qu’une crémation pollue moins qu’une inhumation, ce qui est vrai sur un temps long. Par contre,  alors que les inhumations se font globalement localement ((il faut le plus souvent habiter la commune pour acquérir une concession), ce qui répartit la pollution sur toutes les communes, la crémation concentre, elle, la pollution de toute une partie du département en un seul lieu. Le lieu où est implanté le crématorium est donc sacrifié pour les autres. Les inhumations sont communales, les incinérations sont départementales (900 crémations à l’année pour un crématorium, 60 inhumations en moyenne dans une commune de la taille de Seysses).

 

Et si on parlait alternatives : ni inhumation, ni crémation

Il existe des alternatives écologiques à la crémation et à l’inhumation, déjà pratiquées dans plusieurs pays.

- La résomation encore désignée par promession ou bio-crémation est un procédé développé en Suède. Le défunt plongé dans de l’azote liquide est  refroidi à -196°C. Devenu friable, il est placé sur une table vibrante pour provoquer sa destruction en particules fines. Après tamisage, la poudre obtenue est placée dans une urne biodégradable afin d’être enterrée. Aucun rejet de vapeur de mercure n’est dégagé dans l’atmosphère.

La promession est actuellement autorisée en Suède, Allemagne, Royaume-Unis, Corée du Sud, Afrique du Sud.

- L’aquamation ou hydrolyse alcaline consiste à réduire le corps en cendre sans crémation. Après immersion dans un caisson rempli d’une solution alcaline, il y a mise sous pression et chauffe à 160°. La poudre de calcium obtenue peut être placée dans une urne biodégradable ou non. Limitation des rejets de CO², pas de pollution par le mercure et les métaux lourds. Utilise 10 fois moins d’énergie qu’une crémation

L’aquamation est utilisée en Australie, en Angleterre, aux USA (dans 7 états américains dont la Floride, la Pennsylvanie et le Minnesota) et au Canada.

 

Ces deux techniques ne sont pas proposées par les sociétés de pompes funèbres en France car :

- La mise en cercueil est une obligation législative.

- Seules l’inhumation et la crémation sont autorisées.

La France… et sa culture du lobby auprès des politiques. (La société des crématorium de France est une société par action simplifiées au capital de 4 millions et demi d’euros, qui déclarait en 2011 un chiffre d’affaire de plus de 7 millions d’euros).

 

Un question également  environnementale :

Au-delà de la pollution, la question environnementale doit être posée. L’histoire industrielle et routière de la vallée de la Garonne en fait un lieu où l’implantation d’un crématorium peut être opportune : cette vallée, depuis l’antiquité, a été utilisée pour le tracé d’axes routiers (voie romaine de Toulouse à Saint-Bertrand, puis chemin de fer, autoroute), et, puisque le transport y était possible, pour l’installation de sites de production.  En rapport avec le fleuve, on y trouve d’anciennes gravières, non cultivables, proche de l’autoroute, et pour certaines sans habitat. C’est sur un site de cette nature que l’implantation d’un crématorium gênerait le moins.

Seysses se trouve justement sur ce couloir lié au fleuve. Sinon, les anciennes gravières le long de la Garonne ne manquent pas. Un crématorium à Seysses, ça peut être opportun, et il faut bien accepter des infrastructures pour l’équipement public, comme d’autres acceptent le passage du TGV ou de l’autoroute. Mais ce n’est pas obligé non plus que ce soit à Seysses précisément.

 

Halte à la désinformation

Pour finir, soyons vigilants : être opposant au projet du SIVOM, ce n’est pas être opposant au crématorium. Il faut certes quelque part dans notre département un crématorium. Pourquoi pas à Seysses. Mais pas sur un terrain agricole et pas en dégradant un peu plus l’environnement. Il y a d’autres possibilités. Comme le dit le préfet lui-même : le choix de ce terrain ne relève que d’une opportunité foncière, il ne relève d’aucune étude. Le SIVOM a un terrain à cet endroit dont il ne sait que faire ? Et bien, hop, le crématorium, on va le mettre là, sans se demander si c’est le bon endroit. C’est décidé par le maire de Frouzins sans concertation, et les élus seyssois qui nous représentent au SIVOM se taisent.

Le laxisme de nos élus en matière de dégradation environnementale, leur compromission avec les lobbys de l’argent industriel, ont fait assez de dégâts ces dernières décennies. La prise de conscience dans nos sociétés des nécessités écologiques n’autorise plus ces projets où l’être humain, en bout de chaine, et le plus grand perdant.

Nos enfants et petits-enfants méritent qu’on leur laisse un monde meilleur. Nous leur devons un monde meilleur.

 

 

 

 

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