Seysses : patrimoine en danger

Le conseil municipal peut-il vendre le patrimoine des seyssois ?

Sous son actuelle couche de crépis, le bâtiment du foyer rural que nous connaissons tous, sur la place de l’Eglise présente une belle façade en briques foraines. Il y a fort à parier que les fenestrous en demi-lunes, au grenier, existent toujours sous la modification qui a été faite, sans doute parce que des vasistas carrés étaient moins chers que du sur mesure cintré. La dimension des carrés actuels paraît s’inscrire dans les demi-disques d’origine.

Ce bâtiment a toujours été un bâtiment public. Il a toujours appartenu aux Seyssois. A tous les Seyssois.

Créé dans la seconde moitié du XIXème siècle, il a d’abord été la première école communale de Seysses, et la première mairie. La porte de gauche donnait accès à l’unique salle de classe. La porte de droite s’ouvrait sur le préau couvert où les arrières-grands-pères de certains Seyssois habitant encore le village ont dû jouer. A l’étage se trouvait la salle de la mairie, et le logement de l’instituteur.

A l’arrière, un grand terrain descend en pente douce jusqu’au Binos, et on peut imaginer que, le printemps arrivant, les enfants devaient s’en donner à cœur joie dans cet espace immense. A la veille des vacances, peut-être allaient-ils pêcher les écrevisses dans le ruisseau, ou simplement y tremper les pieds pour se rafraîchir et s’asperger.

Lorsqu’une nouvelle école a été construite, rue du Général De Gaulle, la partie correspondant à l’école est devenue La Poste et les Télégraphes. Nombreux sont les vieux Seyssois qui ont connus cette poste.

Au fil du temps, le préau couvert est devenu la salle où l’on attendait l’autocar pour aller à Toulouse ou à Muret.

Aujourd’hui le bâtiment est notre foyer rural. C’est toujours un bâtiment public. Comment pourrait-il en être autrement ?

Mal entretenu (comme tant d’autres lieux à Seysses), il nécessiterait des travaux, et, comme toujours lorsqu’on attend trop, ces travaux représentent à présent une somme élevée.

Faut-il pour autant le vendre ? A-t-on simplement le droit de le vendre ? Quelques personnes ont-elles le droit de le vendre ?

Nous en sommes tous propriétaires. Mais ne nous y trompons pas : nous n’en avons pas hérité, il nous a été confié par nos anciens pour que nous puissions le confier à notre tour aux plus jeunes. Nous n’en disposons pas. Il a été bâti pour que nul n’en dispose jamais. C’est un peu comme si, moralement, chaque génération en avait l’usufruit, mais pas la nue-propriété.

Et puis, peut-on vendre un lieu aussi symbolique ? Lieu de notre citoyenneté, comme Mairie ; lieu de notre émancipation, comme Ecole Publique aux heures où l’Ecole devenait libre et obligatoire ; lien entre les hommes d’ici et d’ailleurs comme Poste et Télégraphe, et gare d’autocars ; lieu de notre ruralité, comme foyer.

Après avoir porté et abrité autant de symboles, ces pauvres vieux murs que nous avons déjà bien trahis en les négligeant peuvent-ils être à vendre ? Ils peuvent encore rendre tant de services aux Seyssois, et s’ils ne peuvent être restaurés aujourd’hui, peut-être pourront-ils l’être demain, situés idéalement comme ils sont, en plein cœur du village, sur la place, avec ce grand espace de verdure à l’arrière, et le ruisseau qui chante sous les arbres.

Tout est à casser à l’intérieur ? Tant mieux ! Un architecte un jour y pensera un espace public moderne et lumineux, qui mettra en valeur les vieux murs.

Alors, moi, je voudrais vous le dire du fond du cœur :

 

Monsieur le Maire,

Messieurs et Mesdames les Adjoints et Conseillers,

Peut-être que légalement vous avez le droit de vendre ce bâtiment (?). Mais légitimement et moralement vous ne le pouvez pas. Moi qui en suis propriétaire, je ne vous autorise pas à le vendre, en mon nom et au nom de ceux qui viendront après moi et qui en auront peut-être l’utilité. Un bien pareil, au cœur du village, élément du patrimoine seyssois depuis un siècle et demi, porteur de tant de symboles, ils ne le trouveront plus, même pour des sommes gigantesques qui dépasseraient le maigre gain que vous pensez tirer de cette vente.

Notre patrimoine n’a pas de prix !

On ne vend pas un bien du patrimoine, ça ne se fait pas. Il ne vous appartient pas. Vous ne pouvez pas décider, sans nous tous, de le vendre, et encore faudrait-il que nous soyons tous d’accord, sans qu’il en manque un, car nous le possédons tous en indivision : c’est cela un bien public, c’est cela le patrimoine. Nous avons le devoir de le protéger, pas de le vendre.

 

Bruno Berbis

 

 

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